Addis-Abeba, Éthiopie, le 23 mars 2021 (CEA) - Dans le but d’aider les États membres à avoir accès à une facilité qui renforcera leur liquidité à court terme et relancera la croissance à plus long terme, la Commission économique pour l’Afrique (CEA) met en place une Facilité de liquidité et de durabilité (LSF) qui réduirait les coûts d’emprunt des gouvernements en augmentant la demande de leurs obligations souveraines.
Cet objectif sera atteint en permettant aux détenteurs d’obligations souveraines existants de déposer ces instruments en garantie de prêts à faible taux d’intérêt financés en partie par une nouvelle émission de Droits de tirage spéciaux (DTS). Les ressources mobilisées au travers de tels accords de rachat seront ensuite utilisées pour financer des investissements dans les emprunts de marchés émergents.
Les décideurs africains doivent rechercher une augmentation des prêts auprès des banques multilatérales de développement afin de pouvoir répondre de manière adéquate à la pandémie de COVID-19.
Expliquant l’initiative LSF lors d’une table ronde lors de la 53ème session en cours du Comité des ministres des finances, Thomas Venon, partenaire de Eighteen East Capital, déclare que la LSF est conçue pour aider les marchés émergents à faire progresser les initiatives de développement durable et, plus immédiatement faciliter l’accès aux liquidités, aux prêts et aux investissements dans ces pays.
Afin de répondre à leurs besoins croissants de financement du développement, les pays africains ont emprunté à des créanciers privés. En conséquence, le paysage de leur dette a changé au cours de la dernière décennie, la dette privée assumant un peu plus de 40% de l’encours total de leur dette. Les taux d’intérêt sur la dette privée de l’Afrique sont toutefois prohibitifs, d’où la nécessité d’une facilité telle que la LSF.
« Les pays développés bénéficient depuis longtemps de l’existence de grands marchés « repo » pour leurs obligations d’État, ce qui facilite la création de sources de financement stables et supplémentaires », affirme M. Venon.
« La LSF reproduira cette dynamique pour les obligations souveraines des marchés émergents, en fournissant aux investisseurs un financement compétitif via des accords de mise en pension ».
Il ajoute : « La gouvernance de la LSF sera alignée sur la mission de bien public et son adhésion aux normes de transparence les plus élevées. On estime que la LSF pourrait permettre aux émetteurs africains d’économiser 11 milliards de dollars en frais d’intérêt sur une période de cinq ans ».
Cette facilité ouvrirait la voie à la communauté mondiale afin d’aider les décideurs africains à relancer et à réinventer une croissance durable, par exemple en introduisant des outils de financement innovants tels que des obligations liées à la poursuite des Objectifs de développement durable.
En proportion du Produit intérieur brut et des recettes d’exportation, la dette de l’Afrique d’environ 544 milliards de dollars est la plus élevée de toutes les régions en développement. Les niveaux d’endettement élevés entravent les investissements publics dans les infrastructures et le développement humain et découragent à leur tour les investissements privés.
Selon la CEA, les pertes de production du continent dues à la COVID-19 s’élèveront à un peu moins de 100 milliards de dollars et se traduiraient par un renversement significatif des gains réalisés pour lutter contre la pauvreté ces dernières années et pousser près de 30 millions de personnes dans la pauvreté. Alors que les pays en développement ont injecté des milliards de dollars dans les filets de sécurité sociale, le soutien aux soins de santé et les mesures de relance économique, l’Afrique n’a pas eu cet espace budgétaire pour réagir de la même manière.
Le continent est confronté à quatre défis combinés à savoir, des niveaux d’endettement accrus, actuellement estimés à environ 69% du PIB, un déficit budgétaire élevé de 8,7% en moyenne du PIB, un coût d’emprunt élevé et des dépréciations de devises par rapport aux principales devises.
Selon la CEA, les gouvernements africains sont également sous pression pour maintenir les paiements du service de la dette et éviter la stigmatisation sur les marchés financiers associée à l’allégement de la dette.
Pour les pays africains, les dépenses de santé augmentent à mesure que les revenus diminuent, exerçant de fortes pressions budgétaires sur le financement public, le déficit budgétaire total de l’Afrique doublant presque de 4,7% du PIB en 2019 à 8,7% en 2020, selon les estimations de la CEA.
La forme de la relance économique en Afrique dépendra de risques défavorables, notamment l’émergence potentielle de crises financières et l’instabilité de la dette, en raison de l’affaiblissement des économies.
C’est pourquoi la CEA a mis au point l’entité ad hoc, la LSF, pour aider les pays africains à accéder à de nouvelles liquidités et inciter les investisseurs du secteur privé à réintégrer ou à entrer sur le marché pour la première fois.
Aia-Eza DaSilva, Secrétaire d’État aux budgets et aux investissements publics de l’Angola, déclare que l’initiative LSF pourrait apporter une certaine liquidité à la dette souveraine.
« La liquidité est très importante en ce moment car nous manquons d’espace budgétaire. Le service de la dette est si énorme, et il absorbe la plupart de nos budgets, nous avons donc besoin d’un espace budgétaire pour subvenir aux besoins de notre population et pour nous permettre de croître et d’être en mesure de rembourser ces dettes », déclare Mme Da Silva.
« Nous avons besoin d’espace supplémentaire pour respirer afin de continuer sur la voie de la croissance, et le LSF peut nous le fournir ».
La 53ème session de la Conférence des ministres africains des finances, de la planification et du développement économique de la CEA se tient sous le thème, « Industrialisation durable et diversification de l’Afrique à l’ère du numérique dans le contexte de la COVID-19 ».
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