Quarante-cinquième session ordinaire
du Conseil exécutif
Éduquer une Afrique adaptée au XXIe siècle :
Construire des systèmes éducatifs résilients pour un accès accru à un apprentissage inclusif, qualitatif, durable et pertinent en Afrique
Allocution du
Secrétaire général adjoint de l’ONU et
Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA)
Claver Gatete
Accra
18 juillet 2024
Excellence, Mohamed Salem Ould Merzoug, Président du Conseil exécutif et Ministre des affaires étrangères de la République islamique de Mauritanie,
Excellence, Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l’Union africaine,
Excellence, Shirley Ayorkor Botchwey, Ministre des affaires étrangères de la République du Ghana,
Excellence, Monique Nsanzabaganwa, Vice-Présidente de la Commission de l’Union africaine,
Mesdames et Messieurs les ministres et chefs de délégation, commissaires et chefs d’organes de l’Union africaine,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
C’est pour moi un grand plaisir de m’adresser à la quarante-cinquième session ordinaire du Conseil exécutif sur ce thème majeur qu’est l’éducation.
Je voudrais tout d’abord remercier le Gouvernement de la République du Ghana pour son hospitalité et son accueil chaleureux.
Excellences,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Pour sauver le Programme de développement à l’horizon 2030 et réaliser l’Agenda 2063, nous devons mettre l’éducation, la science, la technologie et l’innovation au premier plan.
Malheureusement, l’Afrique est confrontée à des défis importants, principalement en raison de financements insuffisants et d’un endettement élevé.
Les gouvernements ont du mal à accéder aux financements concessionnels à long terme. L’aide publique au développement et les investissements directs étrangers diminuent. Nos ratios impôts/PIB limités entravent encore davantage la mobilisation des ressources nationales.
Ces défis financiers sont exacerbés par l’augmentation des coûts des denrées alimentaires et de l’énergie, alimentée par des événements climatiques extrêmes de plus en plus nombreux et imprévisibles, qui réduisent la marge de manœuvre budgétaire de nos pays. En outre, les règles du jeu restent inégales au niveau mondial, les coûts d’emprunt de l’Afrique étant plus de dix fois supérieurs à ceux de l’Allemagne et près de quatre fois supérieurs à ceux des États-Unis d’Amérique[1].
Nous devons donc continuer à plaider en faveur de la réforme de l’architecture financière mondiale de façon qu’elle soit adaptée à son but.
Excellences,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Malgré ces obstacles, l’Afrique dispose d’un potentiel considérable : d’immenses terres arables, des ressources naturelles convoitées et des ressources minérales essentielles, un important potentiel d’énergie renouvelable, une population jeune et un marché étendu. Toutefois, un « potentiel » ne constitue pas un moteur de la croissance et ne permet pas de juguler l’inflation. Nous devons traduire ce potentiel en actions, en commençant par la transformation de nos systèmes éducatifs.
L’éducation doit être intégrée dans notre politique industrielle. Nous ne devons pas hésiter à adopter cette approche, car d’autres pays font de même pour atténuer les chocs extérieurs.
Que ce soit la loi américaine sur la réduction de l’inflation ou la politique « Made in China », en passant par la loi européenne sur les semiconducteurs, pour n’en citer que quelques-uns.
Il va sans dire que la science, la technologie et l’innovation, les STI, doivent être au cœur de notre programme de développement.
Elles sont le fondement de la construction de sociétés fortes, compétitives, résilientes et prospères.
Sans STI, nous ne pourrons pas éviter le piège du revenu moyen, ni prétendre être à notre place dans le XXIe siècle.
C’est pourquoi nous devons faire des efforts délibérés pour que les trois quarts des jeunes Africains qui n’ont pas de compétences numériques soient équipés pour participer de manière significative à la main-d’œuvre de demain.
Nous ne pourrons peut-être pas rattraper les 370 milliards de dollars des États-Unis consacrés à la recherche et au développement en 2023 par les seules entreprises Amazon, Alphabet, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia et Tesla.
Mais des investissements délibérés dans la recherche et le développement en Afrique, qui représentent actuellement 0,45 % du PIB, et dans les cours de STEM sont fondamentaux pour récolter les bénéfices des technologies intelligentes et de l’intelligence artificielle.
Nous avons la situation en main.
Il suffit d’une volonté politique et d’une allocation intelligente des ressources.
Il y aura des compromis, mais c’est pour cela que nous sommes ici.
Pour faire des choix et prendre les bonnes décisions.
Nos écoles doivent être connectées.
C’est une condition sine qua non si nous ne voulons pas laisser plus de gens à la traîne.
Un choix que nous ne pouvons pas nous permettre.
Les niveaux de connectivité actuels, qui sont de 40 % des écoles primaires et de 50 % des écoles secondaires du premier cycle, ne suffiront pas[2].
Dans ce domaine, des solutions innovantes telles que l’initiative Giga, lorsqu’elles sont mises en œuvre à plus grande échelle, peuvent faire une réelle différence en connectant toutes les écoles à Internet.
Excellences,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Cependant, stimuler l’innovation et moderniser nos systèmes éducatifs nécessitera des investissements importants et les gouvernements ne peuvent pas se le permettre à eux seuls.
C’est pourquoi nous devons créer les bonnes incitations pour que le secteur privé participe de manière significative à cet important programme de transformation.
C’est une question de bon sens.
En effet, le secteur privé africain ne peut être compétitif au niveau mondial qu’avec une main-d’œuvre dotée des bonnes compétences.
L’élargissement de l’accès à l’enseignement et à la formation techniques et professionnels profite au secteur privé et est essentiel pour l’emploi et la création d’emplois.
Libérer tout le potentiel du partenariat public-privé est une solution gagnante pour tout le monde.
Enfin, il ne faut pas négliger le rôle des mécanismes régionaux.
Nous avons besoin d’économies d’échelle pour générer les ressources nécessaires.
C’est pourquoi les agglomérations régionales nous offrent la possibilité de développer le secteur privé, de créer davantage d’emplois et de stimuler le commerce et les investissements.
Excellences,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Assurer un financement adéquat de l’éducation est à la fois un impératif et un droit de l’homme.
Ce qui se passe autour de nous doit renforcer notre volonté de justice et d’équité.
Nous devons également à nos générations futures de rester déterminés à répondre à l’appel en faveur d’une meilleure architecture financière mondiale.
La semaine prochaine, à Addis-Abeba, les ministres des finances et d’autres parties prenantes du monde entier se réuniront pour la première des quatre réunions préparatoires à la quatrième conférence sur le financement du développement, prévue en 2025 en Espagne.
Il en résultera un nouveau consensus sur la gouvernance économique et financière mondiale.
C’est peut-être l’Afrique qui a le plus à y gagner.
Et nous avons l’occasion de faire entendre notre voix.
Nous comptons sur votre participation active.
Il faut que l’Afrique définisse une position commune solide et fasse entendre sa voix.
La CEA reste déterminée à travailler à vos côtés.
Je vous remercie de votre attention.
[1] Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), calculs de la publication « A world of debt » (Un monde de dettes).
[2] Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), Rapport de la Coalition mondiale pour l’éducation, voir : https://www.unesco.org/fr/articles/le-nouveau-rapport-de-la-coalition-mondiale-pour-leducation-de-lunesco-souligne-le-role-cle-de-la.