Addis-Abeba, Éthiopie, le 3 février 2019 (CEA) – L’Afrique ne peut se permettre la hausse du coût résultant du manque de paix et de sécurité, déclare ce lundi, la Secrétaire exécutive, de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Vera Songwe.
S’exprimant lors de la 35ème réunion consultative pré-Sommet de la campagne de l’Union africaine, « Le genre est mon agenda (GIMAC) », Mme Songwe, dit qu’un nombre élevé d’armes à feu circulant sur l’ensemble du continent continuent systématiquement de faire taire les voix des femmes, les privant de dignité humaine à des niveaux sans précédent.
« Les femmes peuvent aider à améliorer la croissance économique de l’Afrique de façon exponentielle et cette croissance peut à son tour aider les femmes africaines alors que nous cherchons à combler l’écart économique entre les hommes et les femmes. Malheureusement, cela ne se matérialisera pas avec des chiffres montrant par exemple que plus de 200 000 femmes ont été violées depuis la deuxième guerre du Congo. Nous devons faire taire les armes maintenant », affirme-t-elle.
Elle ajoute : « Chaque fois que des armes à feu retentissent en Afrique, c’est la petite fille qui en souffre et arrête d’aller à l’école. Les femmes meurent en grand nombre et les abus sexuels liés aux conflits augmentent. Avec ces chiffres, nous ne pourrons sérieusement jamais réaliser l’Agenda 2030 pour le développement durable et l’Agenda 2063, l’Afrique que nous voulons. Nous le savons et nos dirigeants le savent également ».
Les pays africains en conflit actif (Somalie, République centrafricaine, Libye, Nigéria, Soudan du Sud et Burundi) ont des chiffres alarmants en termes de viols, d’esclavage sexuel, de prostitution forcée, de grossesses forcées, d’avortements forcés, de stérilisation forcée, de mariages forcés et d’autres formes de violence sexuelle.
Mme Songwe précise que le choix de « Faire taire les armes à feu : Créer un environnement propice au développement de l’Afrique », le thème de la 33ème session ordinaire de l’Assemblée de l’Union africaine est une indication de l’engagement du continent pour la paix et la sécurité en tant qu’ingrédient crucial au développement socio-économique.
À cette fin, la CEA, en collaboration avec le Bureau des Nations Unies pour l’Union africaine et le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine, apporte son appui à la CUA dans l’élaboration d’un Indice de sécurité humaine en Afrique - un outil pour identifier la vulnérabilité et le développement de cadres intégrés qui pourront contribuer à faire taire les armes à feu.
L’outil aidera à suivre les progrès dans la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et des ODD.
« Nous devons également impliquer le secteur privé dans cette campagne. Le secteur privé fabrique et vend les armes à feu, nous devons donc nous assurer de leur participation à cette conversation », déclare Mme Songwe.
Elle ajoute que pour gagner la bataille, il faut des actions audacieuses pour mettre fin à la discrimination entre les hommes et les femmes, en accordant une voix et une agence à celles qui restent en marge de la prise de décisions sur les questions critiques du développement et sur la paix et la sécurité humaine.
Parmi les orateurs figurait l’Avocat Vasu Chergui, Fondateur et Directeur exécutif du Centre africain pour la résolution constructive des différends (ACCORD), qui affirme que l’Afrique est dans une course contre la montre.
Le continent, dit-il, sans industries, emplois ; urbanisation rapide ; le ralentissement économique mondial ; la crise des produits de base, le changement climatique ; les technologies perturbatrices ; la fin de la démocratie néolibérale ; la montée du populisme, nationalisme et de l’autoritarisme est à un carrefour très dangereux.
« Des régions importantes de l’Afrique atteignent un point de basculement dangereux », déclare M. Chergui, ajoutant qu’une transformation pour s’attaquer aux causes profondes des conflits sur le continent prendra entre 20 et 40 ans.
Il dit que les conflits armés, complexes et prolongés caractériseront malheureusement de grandes régions du paysage africain dans les décennies à venir si les moteurs du conflit ne sont pas résolus de toute urgence.
La réunion de deux jours se déroule sous le thème, « Reconnaître et amplifier le pouvoir des femmes et des filles pour faire taire les armes à feu en Afrique ».