Addis-Abeba, 24 février 2021 (CEA) – La Commission Economique des Nations Unies pour l'Afrique, par le biais de son Centre Africain pour la Politique Commerciale (CAPC) et de la Section de l’environnement favorable à l’agriculture et aux entreprises, a organisé un webinaire en collaboration avec l'Institut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires (IFPRI) pour discuter de l'impact de la mise en œuvre de Zone de Libre-Echange Continentale Africaine (ZLECAf) sur le commerce agricole et alimentaire de l’Afrique.
L'agriculture est un secteur économique majeur pour l'Afrique puisqu’il génère environ 100 milliards de dollars des Etats-Unis, soit 15% du PIB annuel continental. Bien que sa contribution au PIB tend à varier d'un pays à un autre, allant d'un peu plus de 2% en Afrique du Sud à 35% au Mali, l'agriculture reste un secteur crucial pour le continent en termes d'emploi, de sécurité alimentaire et dans une certaine mesure pour les exportations.
Malheureusement, l'Afrique est un importateur net de produits alimentaires de base depuis plus de deux décennies, situation qui risque de s'aggraver à court terme en raison de la crise de Covid-19. C'est en cela que la ZLECAf devient cruciale.
David LUKE, Coordinateur de du CAPC, a ouvert le webinaire en faisant remarquer que le commerce intra-africain de produits agricoles et alimentaires pourrait augmenter de 20% à 30% suite à la seule suppression des droits de douane sur les marchandises dans le cadre de la réforme relative à la ZLECAf. Se référant à une récente analyse empirique de la CEA sur les modalités de la ZLECAf sur le commerce des biens, il a toutefois souligné que ces gains ne seront pas automatiques. Les États parties à la ZLECAf doivent finaliser - de toute urgence - leurs offres tarifaires, résoudre les questions en suspens concernant les règles d'origine et, ce faisant, donner la priorité au commerce des produits agricoles et alimentaires.
Ces questions ont été en outre débattues par quatre éminents experts.
Antoine BOUET, chercheur principal à l'IFPRI et co-éditeur du rapport 2020 sur le Suivi du Commerce Agricole Africain – ou African Agricultural Trade Monitor (AATM) – a indiqué que la ZLECAf devrait entraîner une augmentation substantielle des échanges agricoles entre les communautés économiques régionales (CER), et en particulier des produits agricoles semi-finis et transformés. Selon lui, la ZLECAf pourrait contribuer à la formalisation du commerce transfrontalier des produits agricoles et alimentaires en réduisant les risques et l'incertitude pour les commerçants informels, et en particulier les femmes.
Commentant l'AATM 2020, Trudi HARTZENBERG, directrice exécutive du Centre du droit commercial (tralac), a souligné les défis à relever, notamment les mesures non tarifaires (MNT) et les infrastructures, pour que les promesses offertes par la ZLECAf se réalisent. Tout en faisant le point sur les processus de la ZLECAf, elle a mentionné l'importance des sujets de la phase II des négociations (sur l'investissement, les droits de propriété intellectuelle, la politique de concurrence) ainsi que la phase III (sur le commerce électronique) pour faciliter le commerce agroalimentaire ; qui pourraient notamment contribuer à l'expansion de la production agricole, de la transformation alimentaire, du développement des chaînes de valeur, de l'accès à la nourriture, des réseaux de distribution ou même des systèmes de paiement.
Francis MANGENI, actuellement responsable de la Promotion du commerce et des Programmes au sein du secrétariat de la ZLECAf, a souligné la forte volonté politique qui a rendu possible le début des échanges commerciaux dans le cadre de l'accord de la ZLECAf le 1er janvier 2021, et seulement cinq ans et demi après le lancement officiel des négociations de la ZLECAf en juillet 2015. Il a également souligné le rôle du Programme détaillé pour le développement de l'agriculture africaine (PDDAA) qui doit complementer l'accord la ZLECAf pour aider à accroître la productivité dans les secteurs agricoles, améliorer les conditions d'accès au marché et favoriser l'innovation.
Anthony NYAME-BAAFI, conseiller technique sur le commerce multilatéral, régional et bilatéral au ministère du commerce et de l'industrie du Ghana et ancien négociateur commercial en chef de la ZLECAf, a formulé plusieurs recommandations essentielles pour que la ZLECAf favorise le commerce de produits agricoles et alimentaires. Il a indiqué que de concert avec la stratégie agro-industrielle continentale de l'Union africaine, la ZLECAf peut ouvrir des opportunités pour « développer une stratégie agro-industrielle continentale » avec le secteur privé comme moteur de la croissance agricole durable. Il a proposé de s'appuyer sur des organisations de producteurs agricoles fonctionnelles pour garantir la participation des principaux acteurs du secteur agroalimentaire aux négociations et à la prise de décision afin de fournir des solutions innovantes pour améliorer la productivité et le développement du secteur agricole. Pour transformer le potentiel de la ZLECAf en opportunités concrètes, il a conclu que les pays devront initier des politiques nationales d'accompagnement en plus de la mise en œuvre d'autres agendas et programmes tels que le Plan d’action pour le développement Industriel accéléré de l'Afrique (AIDA) et le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA).
Le webinaire s'est conclu sur la nécessité cruciale pour les États membres de mettre en œuvre avec succès l'accord de la ZLECAf afin de réaliser ses impératifs de sécurité alimentaire grâce à un commerce intra-africain accru et à une meilleure résilience. En fin de compte, l'accord de la ZLECAf devrait assurer la transformation du secteur agricole africain et lui permettre de contribuer à la réalisation des multiples objectifs de développement du continent, tels que définis dans le PDDAA et l'Agenda 2063 de l'UA.
Publié par :
La Section des communications
Commission économique pour l’Afrique
BP 3001
Addis-Abeba (Éthiopie)
Tél. +251 11 551 5826
Adresse électronique : eca-info@un.org