Rabat, le 4 décembre 2023 (CEA) – Le Bureau de la CEA en Afrique du Nord a organisé, en partenariat avec le Ministère marocain des Affaires Etrangères, de la Coopération Africaine et des Expatriés, un webinaire le mardi 28 novembre sous le thème : « Combler les lacunes et relever les défis des pays à revenu intermédiaire d'Afrique ».
Tenue dans le cadre des préparatifs de la conférence internationale sur les pays à revenu intermédiaire prévue à Marrakech du 5 au 6 février 2024 - et qui sera organisée par le Maroc en qualité de président du Groupedes amis Pays à revenu intermédiaire, la CEA et le PNUD ; la rencontre a été l’occasion pour des décideurs, praticiens du développement et universitaires d’échanger leurs expériences et avis sur deux défis cruciaux auxquels sont confrontés les pays africains à revenu intermédiaire (PRI) :
1) La question du renforcement du capital humain, le manque de capital humain étant l’un des principaux déterminants du piège du revenu intermédiaire. Pour échapper à ce piège, il est nécessaire que les pays se concentrent sur une croissance fondée sur l’innovation, d’où la nécessité de capital humain adéquat pour y parvenir. Les discussions ont ainsi porté sur les améliorations nécessaires pour permettre aux pays africains de faciliter le développement de secteurs nouveaux, promouvoir une transformation structurelle durable, et saisir les opportunités offertes par la quatrième révolution industrielle pour atteindre le statut de pays à revenu élevé.
2) La lourde problématique de la dette publique : Dans un contexte de crises multiples caractérisé par l’augmentation du volume et du coût de la dette ainsi que des conditions de financement plus défavorables aux PRI qu’aux autres pays, les intervenants se sont penchés sur les options et réformes, dont la question de la restructuration de la dette, à même de leur apporter l’espace fiscal renforcé nécessaire tout en réduisant le risque de crise de la dette.
Au terme des travaux, la Directrice du Bureau de la CEA en Afrique du Nord, Zuzana Brixiova Schwidrowski a présenté un résumé liminaire des débats :
Sur le plan du capital humain, il est important que les pays se focalisent sur les savoir-faire du futur et particulièrement les nouvelles formes d’éducation. Les nouvelles technologies doivent déterminer le « comment », le « quoi » et le « qui » des formations pour renforcer la capacité des PRI à échapper au piège du revenu intermédiaire qui s’est activé plus tôt dans les pays de la région MENA qu’en Asie malgré de lourds investissements dans l’éducation, a-t-elle expliqué.
Concernant la dette des PRI, la problématique de la liquidité est actuellement déterminante étant donnée le coût élevé, et sur une durée plus longue, des emprunts sur les marchés financiers mondiaux. D’où l’importance d’accorder la priorité à des solutions nouvelles comme la restructuration préventive de la dette ou les financements innovants, à condition que ces dernières soient accompagnées de réformes, a-t-elle ajouté.
Aujourd’hui, les PRI se caractérisent par une contribution significative à la croissance économique mondiale avec un tiers du PIB mondial et 75% de la population de la planète. En Afrique où plus de la moitié des pays sont des PRI, ces derniers ont contribué en 2022 pour 71% du PIB du continent alors qu’ils en représentent près de 60% de la population.
Bien que se caractérisant par des différences au niveau de certaines caractéristiques clés (ex : démographie, impact du changement climatique), les PRI africains et du reste du monde sont confrontés à plusieurs défis communsdans leurs efforts pour parvenir à une croissance durable, mettre en œuvre les ODD et améliorer le niveau de vie et le bien-être de leurs populations.
Malmenés par des crises multiples depuis la pandémie de la Covid-19, de nombreux PRI se sont trouvés vulnérables face aux défis de l’insécurité alimentaire, du fardeau de la dette et de l’aggravation de la crise climatique. Aujourd’hui, à l’approche de l’année 2030, la plupart des PRI ont du mal à mettre en œuvre les ODD (Agenda 2030), y compris l’ODD 1 (Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes).
Les PRI africains sont aujourd’hui confrontés à un double défi : si leur statut de revenu intermédiaire les oblige à effectuer des investissements importants pour le maintenir, notamment en raison des impacts négatifs du changement climatique, dans le même temps leur accès aux investissements à même d’améliorer leur résilience climatique est limité par le manque de financements concessionnels accessibles en raison de leur statut de PRIs.
Alors qu’ils sont confrontés à de lourdes charges de dette publique qui limitent leur capacité à investir dans le capital physique et humain nécessaire à la mise en œuvre des ODD et de l’Agenda 2063, les PRI africains voient leur accès au financement encore plus limité en raison de pressions inflationnistes et de taux d’intérêts élevés sur de longues durées, ce qui réduit encore davantage la capacité des individus, entreprises et gouvernements à rembourser leurs dettes, a expliqué Antonio Pedro, Secrétaire exécutif adjoint de la CEA chargé du Soutien aux Programmes.
« Etant donnée l’augmentation rapide du poids économique des PRI, il est impératif que ces derniers, y compris en Afrique, jouent un rôle d’importance correspondante dans la gouvernance économique mondiale. Le siège attribué à l'Union Africaine au sein du G20 et la décision du Conseil d'administration du FMI d'accorder à l'Afrique un 3ème siège constituent des succès significatifs. Ils dotent le continent de plateformes clés, à même d’amplifier sa voix sur des problématiques essentielles," a-t-il ajouté.
La récente poly-crise a accéléré l'augmentation de la dette, ce qui fait de l’Afrique la région la plus confrontée à des risques élevés de surendettement, avec 21 pays présentant un risque élevé de surendettement extérieur ou déjà pris dedans, a déclaré pour sa part Abdellah Ben Mellouk, Directeur de la Coopération Multilatérale et des Affaires Economiques Internationales au ministère marocain des Affaires étrangères.
Il conviendrait de repenser la coopération internationale pour le développement en vue de la rendre plus inclusive et plus juste envers les pays à revenu intermédiaire et de favoriser un dialogue ouvert et novateur sur le concept multidimensionnel du Développement, aller au-delà du PIB lorsqu’on considère les indicateurs de progrès en matière de développement et concevoir des cadres de coopération innovants, qui tiennent compte des particularités et des besoins de développement de cette catégorie de pays, a-t-il ajouté.
Le webinaire sur « Combler les lacunes et relever les défis des pays à revenu intermédiaire d'Afrique » s’est tenu avec la participation de Adnan Mazarei, Chercheur principal non-résident au Peterson Institute for International Economics et ancien Directeur Adjoint au FMI, Mohamed El Moctar Mohamed El Hacene, Responsable du groupe de travail sur la prospérité économique partagée à l’ESCWA ; Anthony Simpasa, Chef de la division des politiques macroéconomiques, de la viabilité de la dette et des prévisions à la Banque Africaine de Développement (BAD) ; Rabah Arezki, Directeur de recherche au CNRS et au CERDI, ancien économiste en chef et vice-président de la BAD ; Audrey Chouchane, économiste en chef pour l’Afrique du Nord à la BAD ; Martin Kessler, Directeur Exécutif du Laboratoire de Finance pour le Développement, ainsi que Amal Elbeshbishi et Amandine Nakumuryango, économistes au Bureau de la CEA pour l’Afrique du Nord.
Visitez la chaîne YouTube! de la CEA pour visionner les travaux du webinaire : https://www.youtube.com/live/zYQGEQBsdiE?si=sKG0rfHUSBfjT_RT
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