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Avec une volonté politique et des investissements, l’Afrique peut tenter de créer son propre vaccin contre la COVID-19

23 mars, 2021
With political will and investment, Africa can take a shot at own COVID-19 vaccine

Addis-Abeba, Éthiopie, le 23 mars 2021 (CEA) – L’Afrique a la capacité de produire ses propres vaccins contre le coronavirus, mais une volonté politique et des investissements infrastructurels sont nécessaires pour aider à financer ces injections d’importance vitale pour arrêter la pandémie, exhortent les experts.

S’exprimant lors d’un panel de haut niveau de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) sur la question à savoir, si l’Afrique est prête à financer ses propres vaccins, des experts de premier plan estiment que l’Afrique a besoin d’une forte volonté politique et d’infrastructures complètes pour déployer avec succès ses propres vaccins.

Le Directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, déclare au panel que le développement de vaccins en un temps record en réponse à la COVID-19 a donné au monde des raisons d’espérer, mais l’espoir doit être pour tous.

« Aucun pays ne peut être totalement immunisé et se sortir de la pandémie, si l’Afrique ne l’est pas, pas même les plus riches », souligne Dr Ghebreyesus, mettant en garde que tant que le virus circulera, il mutera. La distribution équitable des vaccins est le seul moyen sûr de l’arrêter.

« Même avec les vaccins, nous avons encore un long chemin à parcourir », dit-il, avisant que la COVID-19 a détruit les économies, perturbé le commerce, les voyages et le tourisme, laissant les pays africains affectés tributaires des importations.

Citant la Banque mondiale, Dr Ghebreyesus fait remarquer que pour chaque mois de retard de livraisons de vaccins en Afrique, 13,8 milliards de dollars de PIB sont perdus.

« Le moyen le plus rapide de remettre les économies sur la bonne voie est l’équité en matière de vaccins », dit-il, ajoutant : « En fin de compte, l’Afrique doit être en mesure de répondre à ses propres besoins en vaccins et autres produits essentiels. Cela signifie financer la capacité de fabrication locale, une réglementation complète et des chaînes d’approvisionnement durables ».

Dr Ghebreyesus fait remarquer que la production de vaccins doit être intensifiée dans les pays où ils sont produits, les sociétés pharmaceutiques étant invitées à partager les droits de propriété intellectuelle, les données et le savoir-faire dans la fabrication de vaccins avec l’Afrique.

 L’OMS a créé le Groupement d’accès aux technologies contre la COVID, connu sous le nom de C-TAP, pour accélérer le développement de produits, y compris des vaccins pour lutter contre la COVID-19.

La pandémie a mis en évidence l’écart critique dans la fabrication de vaccins en Afrique, qui représente 26 pour cent de la population mondiale mais a moins de 0,1 pour cent de la production mondiale de vaccins.

« En fin de compte, la leçon que nous pouvons tirer de cette pandémie est que la santé n’est pas un luxe mais un droit humain fondamental et le fondement de la stabilité sociale et politique », déclare le Chef de l’OMS.

Dr Ghebreyesus appelle les pays africains à ratifier le traité instituant l’Agence africaine des médicaments (AMA) pour réglementer la fabrication de produits médicaux fabriqués sur place, en plus de soutenir une proposition de l’Afrique du Sud et de l’Inde pour une dérogation aux droits de propriété intellectuelle à l’Organisation mondiale du commerce.

« Cela fait un an que nous sommes dans cette pandémie mondiale et l’apartheid vaccinal se déroule devant nous », déplore Winnie Byanyima, Directrice exécutive du Programme commun des Nations Unies sur le VIH / Sida (ONUSIDA). Elle déclare qu’un an plus tard, il n’y a pas de plan mondial pour offrir les vaccins contre la COVID-19 à tout le monde et pour mettre fin à la pandémie, mais il y a 25 ans, le monde a agi pour mettre fin au VIH / Sida.

« Les pays riches vaccinent les gens à raison d’une personne par seconde, mais la majorité des pays en développement n’ont même pas encore administré une seule dose. Depuis la semaine dernière, moins d’un pour cent des Africains a été vacciné et la plupart d’entre eux se trouvent dans un seul pays ».

Mme Byanyima regrette que l’ambition de l’Afrique de vacciner 60% de sa population pour obtenir l’immunité collective n’ait pas été gérée au niveau mondial. Les pays riches et les grandes sociétés pharmaceutiques ne partageaient pas le savoir-faire en matière de vaccins, tandis que les pays africains payaient le double du prix des vaccins que les pays riches.

Répondant aux questions de partage de la propriété intellectuelle, Susan Silbermann, Chef du groupe de travail mondial sur la COVID-19 et Présidente des Vaccins Pfizer, déclare que Pfizer est prête à travailler avec l’Afrique. Elle a établi un plan pour partager publiquement l’expertise, les données et les outils en matière de développement de médicaments et de capacités de fabrication.

Il y a tellement de questions sur la propriété intellectuelle, sur les capacités de fabrication, sur les installations de construction », explique Mme Silbermann. « Ces choses prennent du temps. Il n’y a pas de baguette magique, il n’y a pas à juste claquer des doigts. Il n’y a pas à signer de gros chèque pour permettre à quiconque où que ce soit dans le monde, de parvenir au type de fabrication nécessaire pour des vaccins tels que celui que Pfizer a mis au point ».

Stavros Nocolaou, Cadre supérieur responsable du commerce stratégique de la société pharmaceutique mondiale Aspen, déclare que le meilleur plan de relance économique pour tous les pays consiste à intensifier les vaccinations pour obtenir l’immunité collective souhaitée. Il appelle à une planification à long terme pour investir dans le renforcement des capacités et des compétences. La clé pour cela est pour l’Afrique d’identifier ses forces et de sélectionner les bons partenaires pour puiser dans les ressources et les connaissances locales.

L’Afrique est prête à produire des vaccins parce qu’elle en a produit contre d’autres maladies, déclare le Directeur des Centres africains pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC Afrique), Dr John Nkengasong.

« Nous savons que les vaccins sont la base fondamentale de la sécurité sanitaire sur le continent et nous devons investir dans cela », affirme Dr Nkengasong, ajoutant que « si nous ne le faisons pas, nous nous dirigerons vers l’endémicité de ce virus sur continent et nous aurons des effets dévastateurs à l’avenir ».

Benedict Oramah, Président de la Banque africaine d’import-export (Afreximbank), déclare que l’Afrique n’avait d’autre choix que d’investir dans le développement de ses propres vaccins. La Banque a fourni un financement de 2 milliards de dollars pour l’achat de 270 millions de doses de vaccins. L’Afrique a besoin de plus de 6 milliards de dollars pour se procurer des vaccins en complément du COVAX.

M. Omarah dit que l’Afrique doit soutenir ses propres institutions pour financer le développement de ses propres vaccins.

Tirant les leçons de l’expérience de la gestion de l’épidémie d’Ébola en Sierra Leone, Francis Kaikai, Ministre de la planification et du développement économique, souligne l’importance du déploiement des vaccins à temps et de la planification à long terme.

« Il y a eu une certaine réticence quant à l’acceptation des vaccins. Nous devons mener des campagnes de sensibilisation du public pour lutter contre la mésinformation et la désinformation, en particulier dans les zones rurales », exhorte M. Kaikai.

Son homologue de la République démocratique du Congo, qui a également été touchée par le virus Ébola et maintenant la COVID-19 avec le reste du continent, Sele Yalaghuli, déclare que des accords bilatéraux sont nécessaires pour aider l’Afrique à se procurer des vaccins.

Dr Amadou Sall, Directeur général de l’Institut Pasteur de Dakar, au Sénégal, déclare que l’urgence est nécessaire pour résoudre la pandémie et intensifier le déploiement des vaccins. L’Institut Pasteur a réalisé le premier kit de test COVID en Afrique et isolé le virus de la fièvre jaune et mis au point un vaccin contre celui-ci en dix ans.

Il dit à la panel qu’une approche coordonnée est essentielle dans la recherche et le développement de vaccins, en plus de bons partenariats et d’un réseau de distribution pour réduire les barrières commerciales ainsi que d’avoir des réglementations solides.

« Nous avons la possibilité de produire ce vaccin sur le continent et nous pourrions bâtir un nouvel ordre de santé publique », affirme Dr Sall.

Le panel convient que renforcer la capacité en Afrique de fabriquer des vaccins contre la COVID-19 contribuera énormément à la relance du continent.

 

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