Addis-Abeba, le 9 mai 2024 (CEA) – Les pays africains pourraient exploiter leurs vastes ressources énergétiques renouvelables, leurs forêts tropicales, leurs tourbières et leurs écosystèmes marins pour exporter des crédits carbone de qualité supérieure, fournir ainsi une nouvelle source de revenus, selon le Rapport économique 2024 sur l’Afrique » lancé récemment par la Commission économique pour l’Afrique (CEA), lors du dixième Forum régional africain pour le développement durable (ARFSD-10), à Addis-Abeba, en Éthiopie.
Le rapport indique que les marchés du carbone pourraient soutenir les objectifs de l’Afrique en matière de résilience et de prospérité, conformément à l’Agenda 2063. Ils présentent également une voie potentielle pour atteindre les objectifs climatiques fixés dans l’Accord de Paris.
« Toutefois, l’incapacité à garantir des crédits supplémentaires, une gouvernance appropriée et des prix suffisamment élevés pourrait conduire à des incitations de marché moins avouables qui augmenteraient les émissions de carbone et ralentiraient la transition climatique sur le continent », indique le rapport.
Le Directeur par intérim de la Division de la technologie, du changement climatique et de la gestion des ressources naturelles de la CEA, Nassim Oulmane, explique qu’il existe deux types de marchés du carbone dans lesquels l’Afrique pourrait investir : le marché de la conformité réglementaire et le marché volontaire du carbone (VCM). Mais jusqu’à présent, les crédits du VCM, auquel participent de nombreux pays africains, ne représentent qu’une petite fraction de ceux fournis par le marché global de la conformité réglementaire.
« Dans le VCM, l’échange de crédits carbone est volontaire tandis que le marché de conformité est utilisé par les entreprises et les gouvernements tenus par la loi de rendre compte de leurs émissions de gaz à effet de serre. Il est réglementé par des régimes obligatoires de réduction des émissions de carbone au niveau national, régional ou international », a-t-il expliqué.
« La plupart des crédits du VCM proviennent de solutions fondées sur la nature, notamment la conservation des forêts, l’amélioration de l’agriculture et le reboisement. Les économies d’énergie grâce à l’efficacité énergétique et au changement de combustible étaient des sources supplémentaires.
Le rapport montre qu’en 2022, alors que la valeur du VCM approchait à peine 2 milliards de dollars, la valeur des permis de carbone échangés sur les marchés mondiaux a atteint un record de 850 milliards d’euros (909 milliards de dollars). Sur une note plus positive, les estimations indiquent que le VCM atteindra entre 10 et 40 milliards de dollars d’ici 2030. Un tiers du volume négocié du VCM concernait le retrait de crédits (c’est-à-dire l’achat de crédits pour les prendre en compte dans un engagement), mais l’Afrique n’y a contribué que pour 11 % de ce type de crédits VCM en 2016.
« L’Afrique ne réalise actuellement qu’environ 2 % de son potentiel annuel de crédits carbone », indique le rapport.
M. Oulmane tout en expliquant le potentiel de l’Afrique en matière de crédits carbone, a déclaré que le continent devrait investir dans son potentiel d’énergies renouvelables inexploité ; une main-d’œuvre jeune et en croissance rapide; des terres disponibles et autres actifs naturels ; et de faibles émissions.
« Les revenus de la vente de crédits carbone peuvent fournir des revenus supplémentaires pour des interventions intelligentes face au climat », a déclaré M. Oulmane.
« En plus d’améliorer le climat, bon nombre de ces interventions améliorent les moyens de subsistance, créent des emplois et stimulent de nouvelles activités économiques et industrielles durables. »
L’Initiative pour le marché africain du carbone (ACMI) estime que 110 à 190 millions d’emplois africains pourraient être créés d’ici 2050 si le prix du carbone par tonne atteignait 80 dollars et si des emplois directs et indirects étaient créés au-delà des solutions fondées sur la nature. L’évolution des marchés du carbone présente également des défis pour les économies africaines.
Alors que le rapport montre que le Cameroun, la République démocratique du Congo, l’Éthiopie, le Ghana, le Kenya, le Nigéria, la Tanzanie, l’Ouganda, la Zambie et de nombreux autres pays africains ont participé au VCM, cinq pays ont fait chacun l’objet d’étude de cas sur l’investissement dans une transition durable : le Gabon, le Kenya, l’Afrique du Sud, le Sénégal et le Maroc. Chaque étude de cas examine le contexte politique et stratégique national ainsi que leur intervention en matière d’investissement dans un secteur important pour promouvoir la transition.
INVESTIR DANS LA GESTION DURABLE DES FORÊTS AU GABON
En investissant dans la gestion durable des forêts, le Gabon a pu augmenter les opportunités d’emplois, grâce à l’augmentation du nombre d’industries de transformation du bois dans la Zone économique spéciale du Gabon à Nkok, de 80 en 2009 à 155 en 2018 ; minimiser son taux de déforestation ; améliorer son bien-être social avec une incidence de pauvreté estimée à 33,4 % et un chômage estimé à 28,8 %.
INVESTIR DANS LE DÉVELOPPEMENT GÉOTHERMIQUE AU KENYA
Le développement de l’énergie géothermique a contribué à faire passer le PIB du Kenya de 70,0 milliards de dollars en 2015 à 113,4 milliards de dollars en 2023 et à réduire son empreinte carbone liée à la production d’électricité et ce en remplaçant une partie de la production d’électricité traditionnelle à base de combustibles fossiles.
INVESTIR DANS LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES EN AFRIQUE DU SUD
Modèle pionnier en matière de financement durable, le Programme d’approvisionnement des producteurs indépendants d’énergies renouvelables (REIPPPP), doté d’un processus d’appel d’offres compétitif, garantit des prix adaptés au marché, favorise ainsi la réduction des coûts de production d’énergie. Cela contribue non seulement à la sécurité énergétique du pays, mais améliore également sa compétitivité économique sur la scène mondiale.
INVESTIR POUR LA CROISSANCE VERTE AU SÉNÉGAL
L’investissement dans le modèle d’énergies renouvelables développant des infrastructures d’énergies renouvelables a donné à des millions de Sénégalais un accès à une électricité abordable, favoriser ainsi la croissance, la durabilité et la résilience des communautés bénéficiaires. Le faible tarif, inférieur à 0,04 euro par kilowattheure, a amélioré le pouvoir d’achat de la population et stimulé la création d’emplois.
FINANCE DURABLE POUR UNE TRANSITION ÉCOLOGIQUE AU MAROC
Le développement et la mise en œuvre des différents mécanismes de financement par le Maroc dans le cadre de la Stratégie Bas Carbone – Innovation verte de la municipalité d’Agadir et – Obligations à impact positif – ont créé de nouvelles opportunités d’emploi et stimulé la croissance économique dans les secteurs connexes. Les investissements climatiques en matière de mesures d’efficacité énergétique génèrent des économies pour les entreprises et les ménages et contribuent ainsi à la productivité et à la compétitivité économiques.
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